lundi 11 juillet 2011

Fenêtre sur cour


- Bonsoir ma très chère plume qui me donne vie...

- Simone ?

- Tu n'arrivais pas, alors je me suis décidée à venir jusqu'à la page de garde... Que se passe-t-il ? L'angoisse de la page blanche ?

- Je ne sais pas... peut-être... J'avais envie d'expliquer à quel point tu savais aimer mieux que personne après ce que ta mère t'a fait comme scène... J'ai mille mots en tête mais je cherchais le plus beau pour commencer...

- Tu n'as qu'à venir directement en page 3 et entrer dans le vif du sujet maintenant que tu sais que je suis là ! Et puis je suis sûr que Raoul ne va pas rentrer avant quelques paragraphes...

- Simone... Tu dragues ton auteur ? Mais je sais tout de toi, je sais même ce que tu ne sais pas encore... D'ailleurs, c'est Raoul lui-même qui va te dire toute la beauté de ton amour, page 17.

- Voilà qui nous laisse du temps...

- Simone ! Je me tromperais moi-même si je traversais l'écran de mes nuits blanches !

- Tu ne le ferais pour rien au monde ? Allez... Traverse... Entre dans ton monde, dans le mien... Tu verras comme tu as eu raison de l'inventer... Viens... Cueille la rose pourpre du corps...

- Si j'entrais dans mes histoires, je deviendrais spectateur de la réalité, de tout ce que j'ai construit réellement, et je mourrais de ne plus être, d'être condamné à jouer mes propres textes, et de connaître la fin.

- Parce que tu connais la fin de mon histoire ?

- Non, je ne parlais pas de toi. Toi, tu es éternelle. Tu es le fruit de mon arbre amoureux, un arbre aux racines millénaires. Tu auras tous les âges, toutes les élégances, tous les parfums, je n'aurai jamais fin de toi.

- Je t'aime...

- Je n'ai jamais écrit cela en page 3...

- Non. Pour une fois, c'est moi qui l'écris. Et je te l'écris ici, sur ta première page. Chaque fois que tu ouvriras ce livre, il commencera par ma reconnaissance. Je t'aime comme je te remercie.

- Parfois je me demande si tu n'es pas devenue plus vivante que moi...

- Aucune chance. Plus ton cœur bat, plus le mien parle. Allez, emmène-moi page 17, j'ai besoin d'amour... Comment sera habillé Raoul quand il m'enveloppera de sa magie ?

- Avec cette chemise noire que tu adores.

- Tiens, comme celle que tu portes à l'instant...

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