- Elle te plaît notre chambre Raoul ?
Raoul, allongé sur le lit :
- Tu m'avais parlé d'une chambre avec vue, je ne pouvais pas rêver mieux...
- C'est fou cette Croisette... D'ici, on dirait des fourmis... J'adore cette effervescence...
- Simone, arrête de te pencher comme ça s'il te plaît parce que là, c'est moi que tu mets en effervescence...
- Tu ne devais pas écrire ?
- Je n'ai pas d'inspiration... et puis ma plume me semble avoir envie de glisser sur toi, beaucoup plus que sur une feuille vierge...
- C'est le problème de la feuille vierge ça...
- C'est sûr que toi, tu as déjà reçu quelques autographes...
- Ça veut dire quoi ça ?
- Attends... ça va... tu me tends une perche énorme... Je ne pouvais pas ne pas la prendre...
- Voilà une différence entre toi et moi, moi au moins je te tends une perche énorme ! Ah c'est sûr qu'avec la tienne, pour gagner un titre, il ne faut pas mettre la barre très haut ! Parce que dès que c'est un peu haut, tu sautes dans le vide, tu fais du vent !
- Arrête Simone... Je parlais de MES autographes...
- Mouais... Tu peux remballer ta plume Baudelaire, tu viens d'arroser les fleurs du mal avec ton humour en bois.
Raoul se lève, et s'approche de Simone, il la prend par la taille et se colle contre elle :
- Simone... Je te promets que je te parlais de MES autographes, je voulais juste dire que tu étais un peu moins vierge que la feuille, c'est tout...
- Oui, bah j'avais compris, pas la peine d'en rajouter ! Mais c'est dingue ça ! C'est pas la peine de venir à Cannes pour voir un festival avec toi ! Tu décroches tous les prix mon grand ! Tu ne peux pas réfléchir un peu avant de vouloir faire de l'esprit ?
- Tu es gonflée là ! Tout ça parce que tu es stressée avant la montée des marches ! Je t'aurais dit ça hier ou la semaine dernière, ça t'aurait fait hurler de rire !
Long silence.
- Bon... excuse-moi... C'est que... je ne sais pas quelle robe je vais mettre... Ça me stresse ces marches, tu n'imagines pas...
- T'as qu'à prendre l'ascenseur...
Simone se retourne, sourit, regarde Raoul dans les yeux, qui a ce sourire à tomber, complice, rieur, elle avance doucement ses lèvres vers les siennes :
- Je suis une femme d'honneur, bien élevée, élégante et qui ne se donne pas facilement...
- Je sais...
- J'ai connu quelques hommes, mais tous m'ont traitée comme une reine...
- Je sais...
- Mais si je devais devenir un chef d’œuvre féminin, ce serait uniquement grâce à ta griffe... J'ai adoré chacun de tes autographes, j'adore ton style quand tu écris sur moi, je veux être ton mot, ta phrase, ouvre ma parenthèse, ouvre mes guillemets, introduis quelques virgules en guise de respiration, une longue phrase doit respirer pour garder sa puissance...
- Tu veux quelques points de suspension ?
- Plein... je veux être un point d'interrogation, jusqu'au délice de ta réponse, que tu me laisses en suspension jusqu'à mes accents les plus graves, je veux taper du poing sur la table jusqu'à la fin de ta prose...
- Un poing d'exclamation donc...
Raoul écrivit sur Simone toute la nuit, un roman, une encyclopédie, une œuvre majeure. La chambre était retournée. Presque autant que les deux amants. C'était dimanche, le jour de la remise des prix. Il faisait un temps splendide. Dans l’entrebâillement des volets, un délicieux fil solaire vint se poser sur les paupières encore heureuses de Simone. La première fois qu'elle était venue à Cannes, c'était en vacances, avec ses parents, et sa petite valise en carton. Elle avait neuf ans. Vingt ans plus tard, elle allait monter les marches. Avec sa valise au Carlton.
On frappe à la porte de la chambre. Raoul ouvre un œil :
- Oui ?
La porte s'ouvre. C'est Charlie, l'attaché de presse. Raoul passe la main dans les cheveux de Simone, qui se réveille doucement. En entendant la voix de Charlie, elle se redresse un peu dans ce lit encore chaud de leur amour brûlant, le drap tenu contre sa poitrine. Charlie regarde autour de lui :
- Waouh... C'est le Vietnam ici...
Simone :
- J'adore l'odeur de la palme au petit matin...
Franck Pelé - juin 2012 - textes déposés à la SACD.
Raoul, allongé sur le lit :
- Tu m'avais parlé d'une chambre avec vue, je ne pouvais pas rêver mieux...
- C'est fou cette Croisette... D'ici, on dirait des fourmis... J'adore cette effervescence...
- Simone, arrête de te pencher comme ça s'il te plaît parce que là, c'est moi que tu mets en effervescence...
- Tu ne devais pas écrire ?
- Je n'ai pas d'inspiration... et puis ma plume me semble avoir envie de glisser sur toi, beaucoup plus que sur une feuille vierge...
- C'est le problème de la feuille vierge ça...
- C'est sûr que toi, tu as déjà reçu quelques autographes...
- Ça veut dire quoi ça ?
- Attends... ça va... tu me tends une perche énorme... Je ne pouvais pas ne pas la prendre...
- Voilà une différence entre toi et moi, moi au moins je te tends une perche énorme ! Ah c'est sûr qu'avec la tienne, pour gagner un titre, il ne faut pas mettre la barre très haut ! Parce que dès que c'est un peu haut, tu sautes dans le vide, tu fais du vent !
- Arrête Simone... Je parlais de MES autographes...
- Mouais... Tu peux remballer ta plume Baudelaire, tu viens d'arroser les fleurs du mal avec ton humour en bois.
Raoul se lève, et s'approche de Simone, il la prend par la taille et se colle contre elle :
- Simone... Je te promets que je te parlais de MES autographes, je voulais juste dire que tu étais un peu moins vierge que la feuille, c'est tout...
- Oui, bah j'avais compris, pas la peine d'en rajouter ! Mais c'est dingue ça ! C'est pas la peine de venir à Cannes pour voir un festival avec toi ! Tu décroches tous les prix mon grand ! Tu ne peux pas réfléchir un peu avant de vouloir faire de l'esprit ?
- Tu es gonflée là ! Tout ça parce que tu es stressée avant la montée des marches ! Je t'aurais dit ça hier ou la semaine dernière, ça t'aurait fait hurler de rire !
Long silence.
- Bon... excuse-moi... C'est que... je ne sais pas quelle robe je vais mettre... Ça me stresse ces marches, tu n'imagines pas...
- T'as qu'à prendre l'ascenseur...
Simone se retourne, sourit, regarde Raoul dans les yeux, qui a ce sourire à tomber, complice, rieur, elle avance doucement ses lèvres vers les siennes :
- Je suis une femme d'honneur, bien élevée, élégante et qui ne se donne pas facilement...
- Je sais...
- J'ai connu quelques hommes, mais tous m'ont traitée comme une reine...
- Je sais...
- Mais si je devais devenir un chef d’œuvre féminin, ce serait uniquement grâce à ta griffe... J'ai adoré chacun de tes autographes, j'adore ton style quand tu écris sur moi, je veux être ton mot, ta phrase, ouvre ma parenthèse, ouvre mes guillemets, introduis quelques virgules en guise de respiration, une longue phrase doit respirer pour garder sa puissance...
- Tu veux quelques points de suspension ?
- Plein... je veux être un point d'interrogation, jusqu'au délice de ta réponse, que tu me laisses en suspension jusqu'à mes accents les plus graves, je veux taper du poing sur la table jusqu'à la fin de ta prose...
- Un poing d'exclamation donc...
Raoul écrivit sur Simone toute la nuit, un roman, une encyclopédie, une œuvre majeure. La chambre était retournée. Presque autant que les deux amants. C'était dimanche, le jour de la remise des prix. Il faisait un temps splendide. Dans l’entrebâillement des volets, un délicieux fil solaire vint se poser sur les paupières encore heureuses de Simone. La première fois qu'elle était venue à Cannes, c'était en vacances, avec ses parents, et sa petite valise en carton. Elle avait neuf ans. Vingt ans plus tard, elle allait monter les marches. Avec sa valise au Carlton.
On frappe à la porte de la chambre. Raoul ouvre un œil :
- Oui ?
La porte s'ouvre. C'est Charlie, l'attaché de presse. Raoul passe la main dans les cheveux de Simone, qui se réveille doucement. En entendant la voix de Charlie, elle se redresse un peu dans ce lit encore chaud de leur amour brûlant, le drap tenu contre sa poitrine. Charlie regarde autour de lui :
- Waouh... C'est le Vietnam ici...
Simone :
- J'adore l'odeur de la palme au petit matin...
Franck Pelé - juin 2012 - textes déposés à la SACD.
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