mardi 19 juin 2012

Carnage




- Allô Odette ?

- Ah non c'est Odette à l'appareil ! Qui est-ce ?

Devant la surdité de sa belle-mère, Raoul hausse la voix :

- C'est Raoul !

- Oui bonjour Raoul...

- Pouvez-vous me passer Simone s'il vous plaît ?

- Elle n'est pas là mon petit Raoul. Et puis de toutes façons, elle n'est pas en état de vous parler.

- Passez-la moi, c'est urgent.

- Pour Jean ? Qui c'est ça Jean ? Et pourquoi il n'appelle pas lui-même Jean ?

- C'est URGENT !

- Ah... Bah oui, je me doute bien que c'est urgent, avec ce que vous lui avez dit, il ne va pas falloir attendre très longtemps avant de vous excuser.

- Ce ne sont pas vos oignons Odette ! Dépêchez-vous s'il vous plaît, je viens de mettre une pièce de cinq francs et elle va bientôt tomber, j'ai plein de choses à lui dire avant qu'elle ne fasse une bêtise, passez-moi Simone !

- Qu'allez-vous lui dire ?

- Bon sang mais c'est pas vrai ! Y'a la pièce de cinq qui tombe, passez-moi Simone immédiatement !

- Comment j'ai les seins qui tombent ??? En voilà des manières ! Vous pourriez avoir un peu de respect ! Si c'est comme ça que vous parlez à ma fille, ça ne m'étonne pas qu'elle vous ait quitté ! J'ai peut-être les seins qui tombent mais mon mari a mis un cierge dans ma chapelle jusqu'à son dernier souffle, et il n'en a jamais allumé ailleurs, si vous voyez ce que je veux dire !

- Bon, Odette, posez ce téléphone et allez chercher Simone tout de suite. Vous ne savez pas tout ! Il n'y a rien eu avec cette femme, Simone est la femme de ma vie et je pèse mes mots !

- Nemo ? Le poisson du petit ? Bah v'là autre chose...

Simone :

- Qu'est-ce qu'il dit ?

- Il dit qu'il baise Nemo... Je te l'avais dit qu'il y en avait d'autres...

- Tu as dû mal comprendre...

- Mais... enfin... Simone... dis que je suis sourde aussi ! J'ai parfaitement compris !

Sortant du combiné posé sur la table, on devine la voix hurlante de Raoul :

- Mais oui t'es sourde Odette, t'es sourde comme un pot !

Odette reprend le téléphone :

- Raoul ?

- Quoi ?

- Je ne vais pas vous passer Simone, elle ne veut pas vous parler mais elle veut bien entendre ce que vous avez à lui dire, alors parlez distinctement, doucement, et je lui répèterai tout.

- Sans rien déformer ?

- Je vous le promets. Vous voyez, quand vous parlez doucement, je vous comprends.

- Bon... Quand elle est arrivée à cette soirée, j'étais très vaporeux, j'avais un peu abusé de la boisson. Quand Simone a débarqué, elle m'a vu dans les bras de cette femme, mais il faut tout comprendre de la situation ! Cette femme est l'ancienne institutrice du fils de mon meilleur ami, qui était présent. Je l'ai embrassée suite à un pari, elle a souri et Simone est arrivée à ce moment-là, ce qui explique ma réaction. Mais c'était un pari, il n'y a qu'une seule femme que je pourrais allumer avec mon cierge, c'est votre fille, ma reine, que j'aime à la folie ! Dites-lui que je l'aime ma moitié et qu'elle me manque !

- Ok... Ne quittez pas... Bon, Simone... Il dit que lorsque tu es arrivée à cette soirée, il était dans les bras de son ancienne maîtresse avec qui il a eu un fils qui est devenu son meilleur ami. Il était amoureux, il avait un peu abusé de la toison, ce qui explique son érection au moment où tu es arrivée. Tout a commencé à Paris, où il a allumé une femme avec Serge, apparemment ce serait ta marraine, et enfin, il veut que tu saches qu'il t'aime à moitié.

- Tu es sûre qu'il a dit tout ça ?

- Mot pour mot.

Pendant que Simone essuie ses larmes, Odette reprend le téléphone :

- Allô Raoul ?

- Oui... ?

- Bon, apparemment elle n'est pas du tout convaincue par votre histoire là... Mais permettez-moi de vous dire que ce n'était pas la meilleure solution pour garder ma fille que de se taper sa marraine !

- tuuuut.... tuuuut.... tuuuut.... tuuut....




Franck Pelé  - Juin 2012 - Textes déposés

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