jeudi 6 octobre 2011

Le monde a ses pieds



- Raoul, je ne peux pas t'expliquer à quel point j'aime les chaussures...

- Tu n'as pas besoin de m'expliquer, il suffit que je compte les paires dans le dressing.

- J'ai quand même envie de t'expliquer. Quand je vois une paire de chaussures qui me plaît, j'ai l'impression de vivre la même mécanique que celle qui provoque la chimie amoureuse. En mieux d'ailleurs...

- Pourquoi en mieux ?

- Parce qu'une paire de chaussures ne te répond pas, ne te pose pas de questions, elle dort au placard, elle n'est là que pour te faire briller, pour te transporter avec élégance...

- Oui enfin elle peut te casser les pieds ta paire de chaussures elle aussi...

- Et bien tu en changes ! Pourquoi se taper de la croûte quand on mérite du cuir ? Et quand tu veux remettre les vieilles, tu te rends compte que tes goûts ont changé et elles ne te disent pas un mot si tu les refiles à ta meilleure amie !

- Heu... C'est une généralité ou tu personnalises la métaphore là ?

- Je ne t'ai pas refilé à ma meilleure amie que je sache... Et puis toi, tu es mon talon aiguille, c'est ton regard qui me grandit... Non, sérieusement chéri, quand je craque pour une paire de chaussures, c'est presque érotique, c'est le prolongement de moi qui touche le sol, c'est une expression artistique qui tutoie ma coquetterie, c'est du plaisir pur ! Quand un tel objet sait prendre son pied, l'orgasme alchimique est incomparable, tu te dis que Dieu existe... Tu vois, je pourrais presque me passer des hommes tant le plaisir ressenti est immense lorsqu'une paire me choisit. Parce que c'est elle qui me choisit. Puis je les achète, et le premier jour où je sors avec, je suis finalement ravie que tous les hommes du monde soient à mes pieds. Enfin... façon de parler...



Franck Pelé - Octobre 2011



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