samedi 21 septembre 2013

Splash



- Allez, bats des pieds avec moi, on s'en va...

- Comment ça on s'en va ? On va où ?

- Je ne sais pas, loin, au large, vers l'horizon, une île, une autre côte......

- Mais je suis marié moi, je ne peux pas quitter la plage comme ça !

- Et ta femme, tu peux la quitter comme ça ?

- Non plus, non !

- Qu'est-ce que tu fous là alors ?

- Mais rien, je suis venu parler un peu avec toi et m'accrocher à ton matelas parce que j'étais fatigué.

- Tu te fous de moi ? Je le connais par cœur le coup du matelas, c'est moi qui l'ai inventé !

- Mais je te jure que ça n'a rien à voir avec le matelas !

- Tu me jures ? Mais t'es encore plus gonflé que lui mon pauvre ! C'est même étonnant de ne pas flotter quand on est gonflé à ce point !

- Mais pourquoi tu dis ça ?

- Je ne sais pas, je me fais des idées sûrement, tu m’as quand même demandé où j’habitais, si j’étais seule, ce que je pensais des parenthèses épicuriennes, tu m’as dit que tu t’ennuyais, que tu rêvais d’ailleurs, que tu pourrais partir loin avec moi, là, tout de suite, le tout en regardant mes seins tous les trois mots, je comprends que t’aies eu besoin de t’accrocher, tu dois être fatigué comme garçon !

- Bon, excuse-moi, on peut faire demi-tour maintenant ? Parce qu’on commence à être loin là…

- Et alors ? C’est pas ce que tu voulais ? Ah ça pour se la raconter grand voyageur y’a du monde hein, mais dès qu’il faut mettre un peu de poids dans le maillot de bain, y’a plus personne !

- On parle de quoi là ?

- De ton courage Robinson !

- Je ne m’appelle pas Robinson, je m’appelle Pierre.

- Oui bah dans deux jours tu t’appelleras Robinson si je ne fais pas demi-tour ! Alors maintenant tu vas arrêter de penser avec ta petite hélice, tu vas la remettre à l’eau et tu vas rentrer doucement sans faire de vagues retrouver ta petite famille, vu comme tu étais remonté en arrivant, j’imagine qu’il te reste assez d’énergie pour rentrer les mains derrière la tête !

- Et pourquoi on ne ferait pas un peu d’écume ensemble, là, maintenant ?

- Dis donc l’Apollon des mers du sud, tu t’es probablement déjà fait souffler dans les voiles par des sirènes qui t’ont vu arriver avec tes gros nabots ?

- On parle de quoi là ?

- De ton courage toujours.

- Heu… oui, c’est arrivé oui…

- Mais tu ne t’es jamais pris de râteau à moteur…

- De râteau à moteur ?

- Oui

- Ah non, ça ne me dit rien non.

- Bon, alors tu vas lâcher mon matelas, tu vas rentrer pendant que tu vois encore quelque chose à l’endroit de ta plage sinon je rentre avec toi et je dis à TOUT LE MONDE dans un rayon de dix kilomètres que tu as voulu coucher avec moi dans l’eau, que tu m’as caressé les seins en me racontant ton mariage mais que tu étais tellement diminué par le froid que tu t’es fait bouffer l’hélice par une raie qui pensait que c’était du plancton !

- Mais…

- Y’a pas de mais ! Dégage ! Vite ! Nage ! Mets en route ! Ventile ! Mousse !

Il décroche du matelas pendant que Simone continue de battre des pieds, s’éloignant déjà doucement.

- Mais reviens, je vais me noyer !

- Arrête de parler, nage ! Avec le râteau que tu viens de prendre, tu vas rentrer tout seul ! C’est l’avantage du râteau à moteur ! Et dépêche-toi sinon je rentre avec toi et je vais raconter à Raoul ta petite proposition.

- C’est qui Raoul ?

- Mon mari ! Et s’il apprend la moitié de ton petit numéro, il va te mettre la raie sur le côté et balancer le plancton aux oursins !



Franck Pelé - Juillet 2013 - Textes déposés à la SACD

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