jeudi 20 octobre 2011

Simone s'emmêle les pinceaux



- Ne bouge pas ! Reste comme ça...

- Quoi ? Pourquoi ?

- Quand tu mets ta main derrière ton cou comme ça, tu es belle comme... comme une définition parfaite qu'on n'a pas encore écrite pour exprimer la quintessence de la beauté d'une femme... Tu matérialises la seconde qui précède le chef d’œuvre, c'est le moment où le pinceau de Michel-Ange va glisser sur sa toile, où Chet Baker va souffler dans sa trompette, où Cassavetes va filmer Gena, c'est la seconde où l'on sait que l'exceptionnel arrive, que la classe sublime va nous emporter... Tu vas te retourner, et je vais voir naître le monde...

- Je peux bouger maintenant ?

- Tu pourrais montrer un peu de sensibilité à ma poésie Simone.

- Justement, je vais m'en occuper de mon poète... Tu permets que j'utilise ton pinceau pour te dessiner ce qui me ferait plaisir ?

- Simone...

- Je peux aussi te jouer quelques notes de trompette si tu veux...

- Simone ! Laisse flotter un peu de romantisme merde ! Je me tue à chercher la subtilité la plus extraordinaire et toi tu te vautres dans la métaphore salace !

- La métaphore salace ? La métaphore salace ??? Tous les hommes du monde rêveraient que leur femme leur réponde ce que je viens de te répondre et toi tu voudrais que je te récite l'intégrale de Baudelaire pour t'exciter ? Regarde-la bien la naissance du monde parce qu'il part en couveuse pour quelques semaines ton monde ! Et ton pinceau, tu peux le ranger, c'est pas demain que tu vas me refaire le plafond de ma chapelle Sixtine ! Elle te plaît celle-là comme métaphore salace ? Non mais je rêve !


Franck Pelé - Octobre 2011

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